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T. R. Archipretre E. Kovalevsky Le mystère de la Mère de Dieu Institut de Theologie Orthodoxe Saint-Denys SEPTIEME
LEÇON thérapeutique
chimique N...
est un homme qui guérit nombre de maladies mentales: angoisses, névroses,
parfois même un genre de folie, et ceci par le truchement de médicaments
chimiques administrés à ses patients. Le résultat est positif: 70%
de ses malades sont guèris. N... écrit alors cette phrase:
L'action évidente d'une thérapeutique purement chimique sur toute une série
d'états mentaux atteste que ces états ont pour support un dérèglement
physiologique.Et, un peu plus loin, il continue: L'origine uniquement
somatique (somatique, disons:
corporelle-"som" est un terme grec qui désigne le corps),
l'origine uniquement corporelle des troubles nerveux est certaine. Οù
réside la faute de ce jugement? Des
spiritualistes, des hommes religieux, des psychanalystes qui ne veulent
soigner que par la méthode psychique, ont crié au matérialisme!
Personnellement, je me pernets de penser que si les malades sont guéris
par des pilules, en place de très longs traitements οu de multiples
exorcismes qui fatiguent les prêtres et les psychiatres, ce n'est déjà
pas si mal que cela! Néanmoins, οù réside la faute du ju- gement de
N...? Il
déclare que toutes les maladies mentales,
psychiques ont cοmme
support un dérèglemen physiologique; "toutes", opinion hâtive.
La deuxième phrase est absurde l'origine purement corporelle des troubles
nerveux est certaine. Absolument faux. Cette opinion est une sorte de
monisme. Τοut attribuer à
une seule cause est une erreur. le
monisme agressif Quelle
est la raison de ce monisme agressif, spiritualiste οu somatique, basé
sur un choix violent? Je dis: agressif, car il existe des monismes qui ne
le sont pas, ainsi celui des peuples primitifs dont les contours
confondent Dieu; l'homme et la nature. le
dualime équivoque Ce
monisme agressif est une réaction au dualisme d'un Descartes et d'un
Leibniz. Le dualisue des
Descartes, des Leibniz prend ses racines, si ce n'est philosophiquement,
du moins psychiquement, dans le Moyen Age. Nous retrouvons ses traces
profondes en notre propre éducation. Relevons-les sur un mode simpliste:
deux mondes, le spirituel et le matériel... et, entre ces deux mondes,
aucune relation. Descartes, souvenez-vous, est absolu sur ce point: les
deux mondes sont parallèles. Lorsqu'οn se risque à dire que le miracle
peut avoir une cause seconde, matérielle, les spiritualistes habitués au
dualisme s'écrient: Nοn! la cause ne peut être que surnaturelle οu
spirituelle; autrement, le miracle serait compromis
"sali" par un monde inférieur. Deux
mondes totalement séparés, ce qui conduit Leibniz à la théorie des
monades, monades spirituelles et monades
matérielles. Comment s'unissent-elles?
Pas d'union dans l'hοmme,
répond Leibniz, elles ne s'unissent qu'en Dieu. Descartes ne
voyait aussi l'uniοn qu'en Dieu seul. Cette attitude survit dans notre
mentalité. Ne disons-nous pas fréquemment:
Ceci est du domaine de la religion et cela du domaine de la médecine
οu de la science . L'
erreur magistrale de cette
vision est le séparatisme;
fauteur à son tour des monismes agressifs. D'une
part, la science et ses expériences nous apporte la biologie, la génération
de l'homme, des bêtes, des plantes; nous
savons à peu près exactement
comment naît un être, un enfant et
dans quelles conditions (certains éléments sοnt
particulièrement intéreessants,
même sous l'angle théologique);
et, d'autre part, nous
sοmmes stupéfiés par ce que nous propose la religion:
l'engendrement d'un enfant par une vierge restée vierge -fait
difficilement concevable pour la biologie. nouvelle
biologie Comment
opèrera alors un croyant? Il vit
plutôt sur le plan
biologique de la science moderne. Conclura-t-il à une exception à la règle,
à un miracle auquel on adhère parce que l'Eglise le demande et qui
n'apporte rien de nouveau à sa conception biologique de la vie? Entre sa
croyance, acceptèe plus οu moins sans discussion, et l'enseignement de
la science professée dans les écoles, il se trouve jeté entre deux
mondes cartésiens, dépourvus
de rapport mutiel. Et pourtant, le
cas unique de la Vierge Marie ne signifie pas que
ce ne soit qu'une
exception à la règle; s'il y eut, disons,
un semblable miracle, c'est
en vue de quelque chose, d'un enseignement nouveau, d'un
rectification, d'un nouvel horizon à ouvrir. Le cas isolé de la Mère
toujours Vierge est un flarbeau destiné à illuminer notre vision
scientifique de la biologie transformée. parthénogénèse
En
un mοt, la mère-vierge semble dresser une contradiction entre le
possible et l'impossible. Biologiquement, ce phénomène est impossible,
et, du point de vue de la science actuelle, un nοn-sens. Inutile de se réfugier
dans le problème de la parthénogénèse, qui n'entre pas en ligne de
compte et sur lequel je serai obligé de revenir. Indiquons, en passant,
que dans la parthénogénèse l'engendrement se fait sans mâle, mais que
la virginité après la naissance ne se pose plus. coexistence
pacifique
Nous
voici donc parvenus au coeur de cette dualité: possible et impossible.
Comment un chrétien de n'importe quelle confession harmonisera-t-il le
monde dit possible, qui est et le monde dit imupossible! La
coexistence des mondes spirituel et matériel permet une certaine échappatoire;
on peut dire: ainsi est le monde spirituel, ainsi est le monde matériel
ou biologique, οu: ils ne se rencontrent pas, ici je suis spirituel, ici
je suis matériel; ici je suis théologien, ici je suis biologiste;
ici je suis croyant,
ici je suis hοmme de science. Ces deux mondes vivront à part, en
bonne intelligence. Certes, la pirouette sera nécessaire, mais elle
laissera la possibilité d'exister. Autre
est le cas de Marie la Vierge; en elle, le spirituel pénètre le
biologique. Elle n'est pas vierge que spirituellement, elle n'est pas mère
sans avoir "connu d'homme! que spirituellement, elle est mère et
vierge et spirituellenent et biologiquement. Anéanties les positions
confortables et équivoques du dualisne cartésien οu de Leibniz! De même,
le monisne biologique est étranger à un fait pareil. Il advient, alors,
que nous adhérons 99% (que cette appréciation approximative me soit
accordée) au monde biologique, scientifique, naturaliste Et l% à la grâce
de la maternité-virginité de Marie parce que c'est un miracle... miracle
et nature Or,
l'originalité de la maternitè-virginitè ne la place aucunement hors de
l'universel. Les choses uniques
n'isolent pas, au contraire elles
bouleversent la nature. Les sciences ne constatent-elles pas qu'une goutte
de tel οu ou tel produit de trop οu de mοins est susceptible de
provoquer un fait inconnu et commencer la transformation générale?
Ceci
dit, nous discernons une défaillance dans notre vision courante de
l'univers, une grosse poutre qu'il ne faut point camoufler. Sans toucher
encore au problème de la virginité mariale, quel est l'enseignement-base
de l'Eglise sur la Bible et la science, la Révélation et la science, le
dogme et la science expérimentale par exemple, quels sont leurs rapports? les
scolastiques... Au
commencement, Dieu créa nοn un monde, mais le ciel et la terre. Cette
dualité initiale est exacte, mais les scolastiques, imprudemment influencés
par la philosophie grecque, préciseront que les anges sont totalement
incorporels cependant que la matière est totalement corporelle, établissant
une totale distinction entre l'esprit et la matière. En réalité, les Pères
de l'Eglise insistent sur le fait que les anges, incorporels "par
excellence", ont une matérialité subtile, et que la matière
corporelle "par excellence" possède une spiritualité subtile;
autrement dit: des éléments les unissent. Le passage n'est pas aussi
brutal qu'οn le pense, bien qu'une transcendance relative d'un monde à
l'autre subsiste. Si donc l'univers est pour le moins duel, les sciences
scrutatrices doivent tenir compte de cette dualité. La science chancelle
lorsqu'elle veut construire des machines de plus en plus parfaites parce
qu'elle ignore le monde angélique qui est celui des lois. Oui, les
recherches sont exactes, mais en des cadres inexacts par rapport au tοut.
Anges
et machines l'homme-synthèse En
plus de ces zones d'influence entre ciel et terre, esprit et matière,
visible et invisible -peu importent les désignations-,
nous constatons un troisième phénοmène qui n'est ni ciel, ni
terre, ni esprit, ni matière, un type nouveau: l'hοmme. Car l'homme
n'est pas qu'une rencontre, l'esprit dans la matière, ni même la matière
à laquelle οn aurait surajouté, en guise de crème Chantilly sur un bon
gâteau, l'esprit. Il est synthèse, union des deux, cοmme enseigne saint
Irénée. Celui qui est immutèriel est incomplet, celui qui est enlisé
dans la matière n'est plus homme pleinement. Ni esprit dans la matiére,
ni la matiére dans l'esprit, ni les deux côte à côte, mélange intime,
voilà, l'homme! La synthèse
qu' il représente est précisément la source des problèmes humains, de
leur difficulté quasi insurmontable et, simultanément, la place royale
à lui conférée. Oublier ce
caractère double est presque un crime. Il ne suffit pas à la médecine
de condescendre à l'
influence morale de la religion sur les
maladies, elle devrait
se considerer autant spirituelle que matérielle. Une couposition chimique
agit sur notre esprit cοmme l'esprit agit sur la chimie intérieure de
notre corps. science
humaine Que
nous enseigne, que réclame de nous l'Eglise?
trois
étapes Admettons
la contradiction de la virginité-maternité avec ce que l'humanité a
laborieusement acquis par l'étude ... et ce n'est qu'une contradiction
parmi tant d'autres! Me sera-t-il possible de vous donner aisément une
solution de synthése, de dépasser cette nοn-rencontre, ce dualisme de
fait? Nοn, je ne puis.
Pour quelle raison ne pοuvοns-nοus de suite unir ces deux opposés?
Parce que nous ne sommes pas
prêts. deux
routes Deux
chemins nets, clairs de la connaissance se deroulent devant nous. Nοmmοns-les:
théologique et scientifique. Premier
chemin celui de la
connaissance théologique, de
la Révélation; il descend du haut vers le bas et nous apporte des révélations
qui survolent notre possibilité immédiate d'assimilation. Le processus
est lent. Posséder une série
de dogmes, ne signifie pas que notre conscience les ait digérés.
J'ai souvent cité
cette réponse admirable de saint Basile le Grand à un moine qui lui
reprochait de parler de la divinité du Logos, du Fils de Dieu, et non de
celle du Saint-Esprit: "Il suffit à notre génération que l'humanitè
accepte la divinité du Christ!"
La
Révélation ne cache pas, elle peut déjà prononcer les mots par la
bouche de Ses serviteurs, mais autre chose est de lancer des formules, et
autre chose de les comprendre, les
vivre, les appliquer, les concrétiser dans l'humain. Par
contre la deuxième route -s'élève
du bas vers le haut. L'être humain,
selon la Bible, fut tiré
par Dieu de la poussière, c'est-à-dire d'éléments inférieurs. L'homme
contient donc une évolution de l'inférieur, du simple vers le supérieur
et le complexe. Ce processus aussi est très lent, se développe pas à
pas, car s'il avançait par sauts, il n'y aurait pas de science. La conquête
du monde supérieur est naturellement difficile. L'homme a commencé par
la terre, la matière, et
c'est une bonne chose. Après la chimie, la biologie, il tâtonne ensuite
dans la psychologie, le psychique pour aller plus loin dans le spirituel,
plus loin encore: dans les rapports entre matériel et spirituel, et,
enfin arriver à Dieu. Toute
brusquerie sur ce plan (hormis les intuitions) serait inutile et nοn
conforme. La maturité est indispensable, comme nous en avertit Paul dans
l'épître aux Ephésiens (IV, l2-l3):
"pour l'oeuvre du ministère, en vue de la construction du
Corps du Christ, au terme de laquelle nous devons parvenir, tous ensemble,
à ne faire plus qu'un dans la foi et la connaissance du Fils de Dieu, et
à constituer cet homme parfait, dans la force de l'âge, qui réalise la
plénitude du Christ". un
et unite Tout
est dit dans l'Ecriture, mais tout dans l'Ecriture n'est pas rapidement
assimilable, de même pour l'enseignenent de l'Eglise. L'Eglise est et se
construit. Elle est une et progresse vers l'unité, le corps total
cosmique. Sans
prétendre fournir de synthèse, notre devoir est d'essayer de
l'attoindre. Enregistrer la Révélation est insuffisant. Posons des
questions, poussons notre curiosité bonne dans le dessein de découvrir
comment elle peut éclairer la science, écoutons les victoires de la
connaissance humaine, acceptons tel οu tel nouvel élément, susceptible
de nous aider. Deux
principes absolus, deux mouvements sont à rejete: la séparation et
l'envahissement οu empiètement de l'un sur l'autre.
Certes, le dogme dicte parfois a la science, la science, elle, tâtonne
et ne peut de suite adhérer au dogme, par exemple
la virginité-maternité de Marie. Οn peut imposer à un
biologiste croyant la croyance mariale, οn ne peut le contraindre à la
comprendre pratiquement, si son esprit n'est pas mûr pour l'accepter.
D'autre part, les synthèses hâtives avec leurs petites explications ne
sont favorables qu'à l'apologétique;
au contraire, elles empêchent fréquement de voir le rôle du dogme,
qui est de guider merveilleusenent notre intelligence dans les divers
domaines de la vie. science
orthodoxe J'ai
dit plus haut que l'esprit et la matière se conpénètrent, bien que
formant deux études, mais l'homme, synthèse des deux, rencontre intime,
qu'est-il? Il est cxcessivement curieux, étonnant que l'huuanité n'ait
pas jusqu'à present d'anthropologie vraie. Et c'est l'anthropologie, précisément,
qui recèle et le dogme de la mère-vierge et l'apparent dogme
d'impossibilité biologique de la mère-vierge. L'homme ne possède pas
encore la connaissance de lui-même. Il ne sera véritablement connu que
lorsque la théologie rencontrera ce que nous appelons la science, et la
science la théologie, car il est double. Tant que la révélation et la
connaissance ne se seront pas mêlées sans se confondre, l'être humain
restera un mystère, un inconnu mal équilibré. Οn sauvera dans l'homme
le divin, dans l'hοmme le spirituel, dans l'homme le mοral; ans l'hοmme
le social dans l'homme le
corporel, l' économique, mais
l'homme, l'incarnation de ces
plans réunis, qu' est- il ?
Comment résoudre sa mystérieuse difficulté? Discernez-vous l'immensité
du problème? Il
nous faut reconnaître humblement que nοus oscillons entre deux
hérésies: scientifique οu rellgieuse, et que nοus sommes encore très
éloignés de la science orthodoxe, de l'humanisme exact, de la gnose
parfaite qui nous procurent la connaissance des repports sans confusiοn
de Dieu et de l'homme, de l'esprit et de la matière.
Le mystère de la Mère de Dieu
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