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On Line Library of the Church of Greece


T. R. Archipretre E. Kovalevsky

Le mystère de la Mère de Dieu

Institut de Theologie Orthodoxe Saint-Denys

 

DOUZIEME LEÇON    

Les préfigures de Marie  

L'Ancien Testament contient un grand nombre de symboles annοnçant Marie. Je ne reparlerai point du texte de la Genèse où le Verbe dit au serpent: "Je mettrai inimitié entre tοi et la femme, entre ta postérité et sa postérité: celle-ci (Eve) t' crasera la tête et tu lui blesseras le talon" (Gen 21/l5). Je ne vous parlerai pas nοn plus en détail le rapport d'Eve et de Marie, ni la signification du paradis, lieu élu, jardin au centre duquel est planté l'arbre de vie et de la connaissance - Marie est ce lieu élu οù repose le Logos disant de Lui-Même: "Je suis la Vie et la Connaissance"- et de même que le paradis porte l'Arbre de Vie, la Vierge porta en elle la Vie Divine...  

"Aujourd'hui, Je m'attacherai sur d'autres images, d'autres symboles.    

 

Echelle  de Jacob terme  

Le premier terme, fréquemment employé et appliqué par l'Eglise à la Mère de Dieu, se trouve au chapitre 28 de la Genèse: c'est le songe de Jacob, οu "échelle de Jacob". Selon la concordance des nοms, Abraham est Ie reflet du Père, Isaac celui du Fils et Jacob le reflet de l'Esprit Saint; vous saisissez déjà l'analogie entre l'action divine qui, par l'Esprit Saint, accomplit tout, et Marie qui, sur le plan humain, commence et accomplit tout.  

"Jacob partit de Beer-Schéba, et s'en alla à Charain. Il arriva dans un lieu οù il passa la nuit; car le soleil était couché. Il y prit une pierre, dont il fit son chevet, et il se coucha dans ce lieu-là. Il eut un songe. Et voici, une échelle était appuyée sur la terre, et son sommet touchait au ciel. Et voici, les anges de Dieu montaient et descendaient par cette échelle. Et voici, le Seigneur se tenait au-dessus d'elle; et Il dit: "Je suis le Seigneur, le Dieu d'Abraham, ton père et le Dieu d'Isaac. La terre sur laquelle tu es couché.  Je  la donnerai à toi  et  à ta  postérité. Τa  postérité  sera  comme la poussière de la terre; tu t'étendras à l'occident et à l'orient, au septentrion et au midi et toutes les familles de la terre seront bénies en toi et en ta postérité. Voici, Je suis avec toi, Je te  garderai  partout  οù tu iras,  et Je  te raménerai  dans  ce  pays,  car Je ne t'abandonnerai point, que Je n'aie exécuté ce que Je te dis.   

"Jacob s'éveilla de son sommeil, et il dit: "Certainement, le Seigneur est en ce lieu, et moi, je ne le savais pas! Il eut peur; et dit: "Que ce lieu est redoutable! C'est ici la Maison de Dieu , c'est ici la porte des cieux!" (Gen 28/l0-l7).    

 

Deux extrémités de l'échelle  

Marie est, en vérité, l'échelle de Jacob; par elle, le Verbe et les anges descendent sur terre et, deuxième mystère, Marie est l'Fglise, par elle, nous montons au ciel. Les textes liturgiques se servent de cette image, souvent inclue dans les fêtes mariales. L'extrémité de l'échelle "touchant le ciel" est la virginité au sens total, car la virginité n'est pas que négative, sans souillure, elle "touche le ciel", elle frôle le divin, pointe du créé, s'enfonçant dans l'incréé. Nοtre Seigneur dira sur la montagne: "Bienheureux les coeurs, ils verront Dieu"; purs, vierges, intacts, labeur de la simplicité, purification du péché et de ce qui est inutile. La simplicité est le dernier échelοn de la hauteur.  L'échelle est dressée mais elle est aussi "appuyée sur la terre": maternité de Marie qui engendre le Verbe "fut chair",    

 

La hiérarchie et  l'immédiat  

"Et voici; les anges de Dieu montaient et descendaient par cette échelle". Il me faut, ici, ouvrir une parenthèse: je me rappelle une réflexion faite par un de nos étudiants  à Μ. de  Gandillac, lors d'un cours qu'il donna à l'Institut sur la hiérarchie céleste, reflexion qui vint  d'ailleurs à l'esprit de plusieurs. Pourquoi fault-il,  semble-t-il  que les hommes soient initiés par les anges, les anges par les archanges, les archanges par les principautés et ainsi de suite jusqu'a ce que l'on atteignè Dieu? Cela s'apparenterait à l'armée οù le soldat n'adresse point la parole au général; contraint par la discipline, il parle à l'adjudant qui se tourne vers le sous-lieutenant et ceci de grade en grade jusqu'au chef suprême. Revenons aux hiérarchies angéliques: nous avons l'impression de ne pas avoir de contact avec Dieu, d'autre part, nous passons au travers d'intermédiaires et Dieu S'estompe sur l'arrière-fond de cette armée céleste. Certes, Saint-Denys précise que l'ange transmet le message de l'archange qui transmet à son tour celui de son supérieur, néanmoins, c'est toucher notre Dieu après le passage de neuf miroirs, neuf reflets, au lieu de Le serrer spontanément dans nos bras. Comment comprendre cela? Puisque là οù est Dieu, là sont les anges. La réponse est dans la transparence absolue de leur nature spirituelle: en voyant l'ange, nous voyons l'archange transparent lui-même à la principauté et cela jusqu'à Dieu. De même lorsque Dieu descend en nous, Il traverse les neuf hierarchies angéliques. L'Evangile l'indique dans le récit de la Nativité. Les anges entourent les bergers et la crèche, l'étoile angélique conduit les mages, et l'Eglise chante: "Le Verbe S'incarne, Dieu est parmi nous, Emmanuel, les cieux, -les anges- sont descendus sur terre". Voici une autre expression de l'Ecriture, Sainte au cours de la période de l'Avent: "Il inclina les cieux -les anges- et descendit".  

Sitôt  que Dieu Se dépouille, Se donne,  sitôt les armées  angéliques se donnent avec Lui. Que chantons-nous, en généneral, ,a l'offertoire, en accompagnement  de  la  procession qui transporte les dons  sur l'autel si ce n'est l'humiliation divine, mystiquement soudée aux éléments tels que le pain et le vin,  entièrement présents en ces parcelles de nourriture  terrestre,  mais nous chantons aussi  que les chérubins et les séraphins l'environnent avec  tremblement? L'humiliation et la descente  angéliques,  inséparables de l'humiliation et de  la descente divine,  entourent de même un être  aussi  quelconque  que  le prêtre parce que le Verbe S'est incarné. Dieu est au sommet de l'échelle de Jacob mais Marie dont  le Christ prit chair est à la naissance de cettc  échelle  dans l'humanité.    

 

Buisson ardent  

Un autre symbole par lequel l'Eglise exprime la Mère de Dieu est tire du livre de l'Exode (3/2-6), du récit de la célebre initiation de Moise en face  du buisson ardent.  

"L'ange du Seigneur lui apparut dans une  flamme de  feu, au milieu d'un buisson.  Moise  regarde; et voici, le buisson était  tout en feu, et le buisson ne se  consumait point.
Moise dit: "je veux me retourner pour voir quelle  est  cette grande  vision, et pourquoi  le buisson ne se consume point. Le seigneur vit qu'il se detournait pour voir; et Dieu l'appela du milieu du buisson et dit: "Moise! Moise!" Et il repondit:  "Me voici!" Dieu dit: "N'approche pas d' ici, ôte tes sandales de tes pieds, car le  lieu sur lequel tu te tiens est une terre sainte",  et Il ajouta: "Je suis le Dieu de ton père, le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac et le Dieu de  Jacob". Moise se cacha le  visage, car il craignait de  regarder Dieu".  

La Vierge est le buisson ardent qui porte Dieu. Le buisson ardent exprime une image  parfaite de Marie, car il ne consume pas  tout en étant en feu. Sa maternité  est  le  feu,  sa virginité les branches  qui ne  se consument point.  

Que ce soit l'échelle de Jacob οu le buisson ardent,  la Bible nous avertit: ''Ce lieu est saint", et nous pouvons déjà dire théologiqueument  que  la Vierge  est un  "lieu saint" .    

 

Tabernacle  

Une  troisième image de la Vierge  se  trouve  aussi dans l'Exode en une multitude de textes: le tahernacle. En effet,  si l'univers dans la pensée divine  est le tabernacle habité de Dieu, si notre  corps est la templel du saint-Esprit, le tabernacle  et le  temple  seront, par excellence, Marie en qui Dieu se  reposait. Et tous les détails du tabernacle de l'Epître aux Hébreux -lecture des fêtes de la Vierge- sont des  aspects marials. L'encensoir d'οr: la Vierge renferme  le parfum et le charbon de l'Esprit et du Verbe, le vase précieux contient la manne céleste recueillie au desert: le Christ revele: "Je suis le pain céleste"; tout le symbolisme du temple definit le mystère de la maternité-virginité.    

 

Tables de la loi  

Voici encore une  autre comparaison,  pleinement harmonisée à la Mère de Dieu: les tables de la loi. Le Christ S'incarne dans la pensée de deux manières, en paroles prononcées et en paroles écrites. Les commandements dictés à Moise sοnt gravées sur deux tables préfigurant la maternité et la virginité de Marie. Notre Seigneur a pris chair de Marie afin d'inscrire les nouvaux commandements. Avez-vous remarque qu'Il n'a rien écrit et que les évangiles et les épîtres ne sont apparus que plus tard? Toute la prédication ne fut-elle qu'orale? Non, c'est faux. Le Christ n'a pas cessé d'écrire; Son incarnation autrement. n'eut pas éte parfaite. Mais il écrivit dans Sa chair, Son corps humain. Son enseignement se traça dans le coeur de Sa mère, les coeurs de Ses apôtres en lettres indélébiles.  

Là réside le mystère pοsé par les prophètes. Le papier véritable, parchemin οu  pierre,  sur lequel Dieu écrit est notre corps; ils diront que "l'Esprit inscrira dans nos coeurs". Les livres ne sont qu'un certain grossissement, un "ersatz" de l'Evangile imprimé sur le corps de l'Eglise, sur ceux des croyants et, par dessus  tout, dans le corps du Christ.  Lorsque nous cοmmuniοns à Sa chair, à Son sang,  nous mangeons le Manuscrit  Vivant. Chaque parcelle du Divin  Corps incarné était une parole, une instruction, une loi.

 

Cinquième évangile  

Discernez-vous  ce rythme?  Selon l'enseignement biblique,  juif, le monde fut construit au moyen. de  lettres.  Dès  son premier chapitre, la Genèse nous raconte: "Dieu dit," et telle ou telle créature fut. La parole précède. Ici, elle ne precède plus, elle s'incarne et nous pouvons dire que le Corps du Christ n'est que pensée divine inscrite dans ce Corps. Tout parle en Lui, tout est "logos" (l'homme spirituellement mort ne parle plus et  devient  a-logos). Les tables de la loi, ce deux blocs comprenant quatre  commandements vis à vis de l'homme, représentent aussi les deux natures du Christ, Dieu-Homme  en  une  seule Hypostase, inscrit en Marie.  Voilà pourquoi nous pouvons anrnoncer que le cinquième évangile, tracé sur le Parchemin immaculé par le sang maternel est Marie. Il précède les quatre evangiles et les surpasse.    

 

Espace, absence de Dieu  

Mais la plus belle, la plus admirable vision de la Vierge est celle du temple  céleste  surgi  devant  le prophète Ezéchiel  aux chapitres 50 et suivants. Ezéchiel voit le Saint des Saints -Marie- et ce  Saint des Saints, à l'exemple du temple de Salomon et du tabernacle dans le désert, est empli de la gloire divine. La Présence de Dieu est si οpaque -si l'οn peut dire bien indignement- que nul n'y peut pénétrer.  

La vision spatiale de la Gloire divine nous libère  complétement du faux spiritualisme qui supprime la palpabilité de l'Esprit. Lorsque la Gloire du Seigneur descendait dans le temple au desert οu, ensuite,  dans le temple de Salοmοn, le peuple ne  pouvait y entrer, nοn par crainte mais par manque de place; la Majeste envahissait le temple, comme un nuage, car essayons de le comprendre: si l'esprit n'est pas soumis à l'espace, l'espace n'existe que parce que l'esprit le vide et s'eloigne. L'espace ne possède pas de vie propre, il est là parce que Dieu n'est pas là. Si Dieu est présent, pleinement, nous n'avons plus de place. Pour être en nous, parmi nous; Il Se contracte,  selon la pensée hébraique,  afin de nous laisser la possibilité d'être.    

 

Quatrième porte  

La gloire dans la vision d'Ezéchiel descend donc pour la troisième. fois  en ce  temple céleste  qu'il contemple  et mesure, et qui est le temple de la Jérusalem céleste. Ce mystère du temple et le prototype du monde. La Gloire, proclame prophetiquement Ezéchiel, entre, les portes  fermées,  icône de la Virginité  de Marie  demeurée vierge après que la présence de Dieu -le Verbe- soit descendue  

en elle, et que la Gloire soit entrée et sortie, les portes étant closes. Si nous  observons la structure  des  églises -en général mal réalisées- nous devrions constater que les églises ont toujours trois  portes,  celle par laquelle  on entre  qui  regarde  l'occident, et les portes du nord et du sud. Le fond du sanctuaire n'a pas de porte mais,  en réalité, le  sanctuaire a toujours  une porte  fermée, derrière l'autel, livrant passage au Christ en gloire, au-dessus de  l'autel.  C'est  la quatrième porte,  porte close: Marie.  

 

Sans le secours d'aucune main  

Retrouvons l'image de Marie chez Daniel: il explique au roi Nabuchodonosor, son célebre songe de la statue: "O roi  tu avais une vision, et voici une grande  statue.  Cette  statue immense  et d'une splendeur extraordinaire; elle était debout devant toi, et son aspect était terrible. La tête de cette; statue était d'or pur; son ventre  et  ses cuisses étaient d'airain; ses jambes de fer ses pieds, en partie  de fer et en partie d'argile  (je vous rappelle que ces quatre parties du corps de la statue représentent pour la tradition quatre civilisations successives, quatre empires, le dernier étant l'empire romain qui est de fer. Elles imagent aussi les quatre préiodes terrestres:  d'or,  d'argent,  d'airain et de fer). Τu regardais, lorsqu'une pierre se detacha sans le secours d'aucune main, (la Pierre angulaire sur laquelle est bâtie, l'Eglise, le Christ,  se détache  d'une montagne,  la Vierge,  sans le  secours d'aucune main , sans que l'homme participât à Sa naissance, c'est-à-dire virginalement) frappa les pieds de fer et d'argile de la statue et les mit en pieces". (Daniel 2/3l-35)  

Le symbole de cette pierre est celui de la construction qui suit les quatre periodes d'or, d'argent, d'airain et de fer. L'heure de la pierre  angulaire, du Christ  est venue.  Alors,  sont brisés, mêles ensemble le fer, l'argile, l'airain, l'argent, l'or, semblables à de la paille emportée par le vent. Ils n'ont plus de lieu οù se fixer et "la pierre qui avait frappé la statue devint une grande montagne et remplit toute la terre". (Daniel 2/35b)    

 

Maison de  la sagesse  

Je ne resiste pas au désir d'achever cet exposé des images virginales qui brillent dans l'Aricien Testament par deux comparaisons ineffables tirées du Cantique des Cantiques -La Vierge est le "jardin fermé" οù pénètre le soleil de justice- et du livre sapientique de Salomon, le fils du roi David chante la Sagesse: "La Sagesse a bâti sa maison, elle a taillé ses sept colonnes, elle a immolé ses victimes, mêlé son vin et dressé sa table. Elle a envoyé ses messagers,  elle crie  sur le  som et des hauteurs de la ville: "que celui qui est ignorant entre ici!" Elle dit à ceux qui sont dépourvus de sens: "venez, mangez de mon pain, et buvez le vin que j'ai mêlé;  quittez l'ignorance  et vous vivrez,  et marchez  dans la voie de la prudence!" Proverbes 9/l6.  

La sagesse: premier sens, le Verbe de Dieu, contemplant la maternité prévue des l'éternité, bâtit la Vierge, la maison aux sept colonnes dans laquelle elle depose les sept dons de l'Esprit. Et, dans cette maison, cette Eglise, la Sagesse  appelle, crie du sommet des hauteurs de  la ville, à prendre  le repas, le veau gras, le vin, l'eucharistie.    

 

Agia Sophia  

Le passage précité du livre des Proverbes sur la Sagesse nous conduit à parler de  la liaison intime et mystérieuse d' "Agia Sοphia" (Sainte Sophie)  et Marie.
Nous ne pouvons présenter aujourd'hui,  même rapidement,  le problème  sophiologique aux racines profondement plongées dans le passé, -problème reapparu dans la philosophie de Wladimir Soloviev, développé par de théologiens tels  que Paul Florensky et le Père Serge Boulgakoff . La doctrine  sophiologique  a provoqué une polemique οù j'ai pris part,  m'opposant à la thèse des sophiologues qui confessaient une  "feminité"  en Dieu,  prototype de la créature.) Malgré le vif interêt de ces discussions, nous entrerions en les considerant dans un sujet qui dépasse le cadre de notre cours mais qu'il serait, certes, futile de traiter à part. Peut-être  aurai-je la possibilité d'en parler un jour. Nanmoins, il faut noter que le rite  occidental applique aux solennités mariales  le passage de la Sagesse (Proverbes)  qui mène tout normalement notre  esprit à contempler le mystère mariologique. Voici le texte:  

"Le Seigner m'a creé la première de ses oeuvres,
"Avant ses oeuvres les plus anciennes.      

"J'ai été établit depuis l'éternité
"Des le commencement, avant l'origine de la terre.    

"J'ai été enfantée quand il n'y avait point d'abîmes,
"Point de sources chargées d'eaux.   

"Avant que les montagnes fussent  affermies,  

"Avant que les collines  existassent,  je fus enfantée;      

"Il n'y avait encore  fait ni la terre, ni les campagnes,
"Ni le premier atome de la poussiere du monde. 

"Lorsqu'il desposa  Les cieux,  j'étais là;  

''Lοrsqu'il traça un cercle à la surface  de l'abîme,    

"Lorsqu'Il fixa les  nuages  en haut,  

"Et quelles sources de l'abîme  jaillirent avec force,      

"Lorsqu'Il donna une limite à la mer,  

"Pour que les eaux n'en franchissent par les bords,
''Lorsqu'Il posa les fondements de la terre,
     

"J'étais à l'oeuvre auprès de Lui,
''Et je faisais tous les  jours ses delices,  

"Jouant sans cesse en Sa présence,      

"Jouant sur le globe de Sa terre,  

"Et trouvant mon bonheur parmi les fils de l'homme.      

"Et maintenant, mes fils, écoutez-moi,  

"Et heureux ceux qui  observent mes voies!      

"Ecoutez l'istruction, pour devenir sages,
"Ne larejetez pas.
     

"Heureux l'homme qui m'écoute,
"Qui veille chaque jour à mes portes,
"Et qui en garde les poteaux!      

"Car celui qui me trouve a trouvé la vie,
"Et il obtient  la faveur du Seigneur". (Pro 8/22-35)    

 

Preexistante  

Ce texte suggère que Marie, et en elle la maternité virginale de Dieu incarné, préexistait dans la pensée divine, avant la création, et que Dieu voulut son existence de toute éternité, avant le chaos et la formation de l'univers. Ce qui déroute en ce passage, c'est qu'elle est "présente", "à l'oeuvre auprès de Lui", "jouant en sa présence". La préexistence de la maternité virginale de Marie dans la pensée divine, est conforme aux prédestinations et aux préséances selon la théologie traditionelle et patristique. L'économie créatrice, le plan du devenir contenant le but de l'univers, et ceci de toute éternité, ou plutôt au delà du temps; portés par l'intelligence et la volonté trinitaires, appartiennent à la doctrine orthodoxe. Cela nous permet de parler du monde idéal et du prototype incréé du créé. En ce prototype incréé s'inscrit le mystère marial, chef-d'oeuvre du Créateur. Mais le chant de la Sagesse emploie des images qui nous déconcertent, comme je l'ai déjà dit, car elle présente Marie-Sagesse comme une personnalité, une hypostase consciente en Dieu Tri-Unique. Ce chant la proclame née et nοn créée, avant la creation, "présente" devant la face de Dieu pendant la formation du monde. Certes, οn peut toujours alléguer une forme poétique... Cette méthode exégetique est aussi facile que superficielle.    

 

Enigme sophiologique  

La réponse la plus simple est que la Sagesse pré-éternelle n'est pas Marie, mais le Verbe nοn créé, né du Pere, hors du temps -quelques uns attribuent le nom de Sagesse au Saint-Esprit. La majorité des Pères, particulièrement à l'epoque des Conciles oecuméniques associent Sagesse et Fils de Dieu. Cette notion de Sagesse-Fils de Dieu, se heurta à des difficultés chez les Pères du 4ème siècle, St Athanase par exemple, (car l'Ancien Testament dit qu'elle était "créée"), et les Ariens en profitèrent pour asseoir leur argument que le Fils a été créé. Nous ne pouvons entrer ici dans l'analyse patristique des nombreux textes sapientiques. Le fait est là: la majorité des Pères et la liturgie elle-même identifient le plus souvent la Sainte Sophie au Verbe. Alors, pourquoi l'Eglise choisit-elle le même texte pour les fêtes mariales ?  

Le mystére de l'incarnation est inséparable du mystère marial, voici la première reponse -Saint Irénée en est un précieux temoin-.  

Là οù est Jésus, là est Marie. Les paroles d'Isaie: "Voici, la Vierge deviendra enceinte, elle enfantera un fils, et elle lui donnera le nom d'Emmanuel" (Es 6/l4) sont appliquées a la Nativité de Notre Seigneur et aux messes de Marie . ...  

La deuxième réponse nous conduit a une réponse plus complexe: nοn seulement l' "Agia Sophia" est liée avec Jésus et Marie, elle se confond aussi avec le Saint-Esprit, selοn l'enseignement de Saint-Irénée et de  quelques Pères  (nous l'avοns déjà indique).  

Et la troisième réponse nous enseigne aussi que la Sagesse est une Energie, une Volonté ordonnante de la divine Trinité.  

Ainsi, peut-οn dire qu'elle est le Fils, l'Esprit Saint, une énergie de la Trinité et, la  Vierge Marie. ...  

Trop de  contenus  en un seul terme,  direz-vous  peut-être, confusion. Confusion apparente, car il est indiscutable que "sagesse" appliqué à Dieu, a toujours en vue la creation -"Τu as tout créé par ta sagesses ".  

La sagesse donne au monde un sens de finalité et nοn d'existence, appelant la création à collaborer avec le Créateur; C'est la raison pour laquelle elle est incréée, divine et, en même temps, créée et humaine, le plan de l'économie du monde s'accomplissant par Dieu-Sagesse en coopération avec la Sagesse créée, inscrite dans la prescience divine.
La Sagesse nous emporte en la profondeur sans fond de la pensée divine, dans l'action ineffable et vertigineuse de son oeuvre. Plongeons Marie qui nous fait "jouer" en présence de la Trinité, plongeons toute la nature dans l'abîme de la Sagesse du Très-Haut et taisons-nous. ...  

Demeurons humblement et volontairement dans l'ignorance, disons seulement que Dieu en créant le monςle vit qu'il était beau, et en créant Marie Il vit que le monde était en danse joyeuse et en jubilation.  

Nous possédons d'autres textes significatifs dans l'Ancien Testament; désireux d'avancer dans mon exposé, il ne m'est pas possible de vous les citer et je vous demande pardon de les omettre. Celui qui suit attentivement le rythme liturgique, les découvrira, par lui-même.  

 

Le mystère de la Mère de Dieu

Table des Matières 

 

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