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Olivier Clement Le Monde des Icones
Ιl faut avoir gratitude aux éditions Ides et Calendes, de Neuchâtel, d'entreprendre la publication en français de la collection allemande «Le Monde des icones», dirigée par Martin Winkler. Deux volumes ont paru à ce jour: Marie Mére de Dieu: par N.-Ρ. Gerhard et Les Jours de Fêtes par Martin Winkler (analysé plus loin par Mme Behr-Sigel dans ses «réflexions sur l'iconostase»). La traduction, par Jean-Philippe et Brigitte Ramseyer, est exemplaire de dense fermeté. Signe émouvant, le premier volume paru est consacré a la Mère de Dieu (que l'Orthodoxie, cependant, ne considère pas comme «corédemptrice», contrairement à ce qu'avance Μ.Winkler, p.6). Une longue introduction situe théologiquement et liturgiquement le culte marial dans l'Eglise orthodoxe (l'οn ne peut que saluer cette insertion ecclésiale de l'esthétique orientale) et montre qu'un type primitif commun (attribué par la tradition à une icone de S. Luc) donne à toutes les vraies icones de la Vierge leur ressemblance: qui n'est pas photographique, mais communiante (comme déchiffrement d'une présence personnelle); d'où sa diverse unité, car l'icone, οn ne l'a pas assez remarqué, si elle permet une rencontre, exprime déjà celle du peintre et du prototype (cf. chez certains Pères grecs et spirituels byzantins le thème de la pluralité des aspects du Christ selon la vision et la personne du contemplateur ). L'introduction présente avec beaucoup de justesse les grands types d'icones de la Vierge (rarement séparée de son Fils): Vierge du Signe, en orante, selon Is. 7,l4, figure de l'Eglise dans l'unité des deux Testaments, - Hodigitria, «celle qui montre (Celui qui est) le chemin», hiératique-, et la merveilleuse Eleousa, toute tendresse. Suivent l6 planches en couleurs fort bien commentées (le volume a 80 p.), reproductions d'icones du musée allemand de Recklinghausen: icones russes des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, dont une admirable Eleousa (pl.VII, aux couleurs peut-être un peu déformées dans un goût trop moderne) et une Vierge allaitant du XVIe siècle dont le contexte cosmique annonce curieusement les recherches sophiologiques, de très belles icones grecques et balkaniques: la dernière planche des Balkans, fin XVIIIe siècle, fait songer à Chagall (qui étudiera les rapports de la sensibilité hésychaste renaissant alors avec celle du dernier hassidisme ?) Toute une série de volumes sont en préparation sur les icones du Christ, des anges et des prophètes, des saints... Petits livres amicaux qui deviendront familiers aux orthodoxes et aux amis de l'Orthodoxie: cheminement qui pourrait jalonner un des axes de l'histoire profonde de ce temps, d'Orient en Allemagne, d'Allemagne en pays de langue française par la Suisse, d'un témoignage orthodoxe pour -et par- «l'oeil du cœur».
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